Regard céruléen, maux mauves, rouge coeur et lèvres purulentes du géniteur, affalé sur le siège tâché, qui braille la bénédicité, s'étouffe dans sa puanteur sainte, son ignominie sacrée. Noir le ciel, brisée la lumière des infidèles, des pêcheurs, des fornicateurs, des sodomites, des traîtres et des étrangers, des colorés, des immoraux, des stériles, des hommes et des femmes qui ne se plient pas à l'amour premier, à l'esprit droit, à la langue dorée des écritures données. Alors, alors il faut lire petite, il faut apprendre, il faut réciter ce que dit le monstre et les larmes du soleil ont coulé sur ton visage, sur tes cheveux et sur ton âme souillée par la vilenie familiale, par l'ignominie frontale des bêtes bénies, autorisées, des monstres sacrés. Chétive bohémienne des temps modernes, saltimbanque chrétienne, sauvageonne sans peur ni peine, tes griffes minuscules ont transpercé le voile hypocrite de ton linceul virginal, tes crocs ont tranché la jugulaire cancéreuse de ta maison, asphyxiée par le stupre du sang de ton sang, de la chair de ta chair, et AU NOM DU PÈRE DU FILS ET DU SAINT ESPRIT, et au nom de LA MÈRE, LA FILLE, DE LA HAINE CHÉRIE, t'as couru, t'as couru si vite, t'as couru si fort que tu t'en es écorchée les pieds, que tu t'en es abîmée les plumes, que t'en as fallu avaler ton venin et t'as hurlé, putain, t'as hurlé au monde entier ta liberté, t'as exulté ta joie, t'as goûté au fruit béni de la fonte de tes entraves et t'as remercié jésus, comme un gars sympa, de pas avoir fait sa pute, de pas t'avoir oublié au fond de ton trou, repère de morts et d'enterrés, sanctuaire de fous à lier.
mon dieu, ce n'était pas gentil, tu recommenceras pas, dis ? J'ai un peu mal à l'esprit j'ai un peu mal au coeur j'ai un peu mal à la foi aussi depuis que les ombres viennent me bercer la nuit que la Lune me murmure ses secrets et que je peux, sans qu'on me punisse, hurler que les pierres, les plantes, et les bêtes que le Soleil, le Vent et la Pluie chantent leur sérénade salvatrice chanteur leur mélodie onirique je suis sacrée, je suis baptisée par le meurtre spirituel de mes aînés je peux soigner les enfants et les hommes je peux maudire ceux qui étouffent sous des étoiles de coton ceux qui nous bloquent la respiration je peux jeter des sorts et des bénédictions
Mais, sorcière de carton, tu préfères fabriquer des grigris de dentelle, des contes de pucelle, des gemmes enchanteurs, des philtres d'amour farceurs. Tu vends à l'arrachée tes amulettes aux hérétiques, aux belles et aux magiques. Tu respires le même air que les loups, les assoiffés, les vandales, qui caressent tendrement la peinture défraîchie de ta caravane pathétique, de ta tanière fantasmagorique et tsunami tranquille, tempête tiède, orage paisible, on te regarde de loin rentrer dans ton délire de rouille, sourire solaire sur tes lèvres abîmées. Tu donnes, tu ries et tu aimes, tu souffres devant la pauvreté humaine, tu pleures devant la détresse animale et alors tu pries les pissenlits, tu inventes des fables, tu parles au bon dieu, tu admires les nonnes, tu les couvres de baisers, tu leur écris même des vœux. Des gamins viennent te voir, te couvrir d'insultes salées, parce qu'ils peuvent pas comprendre, ces aigles apprivoisés, comment on peut vivre cette aventure d'âme nomade, cette odyssée de fille-soleil, nuage, jade, comment on peut s'immerger dans le pêché et la pitié, comment on peut avoir chaleur et froidure, comment on peut injurier et bénir, mourir et fleurir. Mais c'est sans doute parce que t'es
impudique, irrationnelle, immature, douce, (in)dépendante, souriante, sans peur, détachée de la réalité, parlant de ton passé par énigme fragmentée, amoureuse du vent et de la pluie, des hommes et de la fraîcheur de la vie, du monde entier, de la galaxie
(t'es une rêveuse des nuits blanches)
on sait pas trop d'où tu viens, on sait pas trop où tu vas, mais on te suit quand même du bout des doigts tu les insulte avec des sourires, tu leur apprends à aimer à en mourir arc en ciel fade, champs de maïs coloré, esprit mystique, âme nomade
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avatar delilah parillo
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